Fred Chappelier.

Publié le par Raimbourg Frantz-Minh

Entretien avec le guitariste/chanteur de blues à l’occasion de ses 25 premières années de carrière et la sortie d’une double compilation.
Photo : Patrick Canigher.

Photo : Patrick Canigher.

Quelles ont été tes influences musicales ?
Je suis né au milieu des années 1960. Le premier musicien que j’ai entendu de ma vie était  mon père. Il jouait de l’harmonica, des standards de jazz, des morceaux des Beatles, des Rolling Stone, un peu de tout…Mon frère aîné ramenait à la maison des disques des grands bluesmen américains, comme B B King, Albert King, Freddie King, Roy Buchanan, Peter Green, Johnny Winter… Mais aussi des groupes et des musiciens de rock tels Jimi Hendrix, Docteur Feelgood, de soul comme Otis Redding et même de soul blues comme Bobby Blue Bland… J’ai baigné dans cette atmosphère musicale depuis mon enfance.
Et les débuts ?
De 1978 à 1980, j’ai commencé par la batterie et cela m’a donné un bon bagage rythmique. Un jour, un ami m’a fait essayer une guitare et ce fut  une révélation, un vrai coup de foudre. J’avais l’impression de connaître cet instrument depuis toujours… Pendant 10 ans, j’ai travaillé plusieurs heures par jour en écoutant les artistes que j’adorais, j’ai développé mon oreille,  je me suis essayé à divers styles musicaux, mais je revenais finalement toujours vers le blues.
Le premier groupe dans lequel j’ai joué se nommait « Kashmir » en référence à un des morceaux les plus connus de Led Zeppelin.
Je suis devenu professionnel en 1990. Je n’ai jamais cessé de faire des concerts, au début dans les pubs, les MJC, les clubs… Il y a eu plus tard « Men in Blue », une combinaison guitare/voix avec Big Joe Barret. On a fait paraître deux CD de 4 titres.
En 1999, j’ai formé mon ultime groupe, « Fred Chappelier Blues Band » avec qui j’ai enregistré deux albums (« Blues Devil ». 2003 et « L’œil du Blues. 2005). En 2004, à l’occasion des « Trophées France Blues », j’ai été nommé « Révélation Blues » et « Meilleur guitariste de l’année ». J’ai laissé tomber les mots « blues band », peut-être trop réducteur pour certains et je suis devenu définitivement « Fred Chappelier ».
Photo : Nicolas Chanoine.

Photo : Nicolas Chanoine.

Photo : Cathie Wetzstein.

Photo : Cathie Wetzstein.

Quel est ta définition du blues ?
C’est un état d’esprit, des émotions pas forcément tristes ! C’est raconter sa vie, les moments joyeux comme d’autres plus difficiles…
Quelle est la place de cette musique actuellement en France ?
Le marché du disque n’est pas au mieux et c’est beaucoup plus difficile maintenant qu’il y a 20 ans. Il y a cependant toujours une scène très active, un public, d’excellents jeunes musiciens, des clubs, des festivals, des revues, des sites… même si cela a ralenti ces derniers mois pour les raisons que tout le monde connaît.
Comment ta musique a évolué avec les années ?
J’écoute toujours les mêmes artistes qu’à mes débuts. Ce qui a changé, c’est ma façon de m’approprier ces formes musicales et de la transformer pour créer mon propre style, entre blues, soul, folk, rock, légèrement pop parfois… Un mix de tout ça (sourire).
Parle-nous de tes guitares !
La Télécaster reste mon instrument de prédilection. J’adore également la Statocaster, la Les Paul, la Flying V…Je choisis mon instrument suivant différents facteurs : il y a d’abord le « feeling » du moment, puis la couleur que j’ai envie de donner à un morceau.
Comment se passe la réalisation d’une chanson ?
Quand j’écris, j’ai une idée très précise de ce que j’ai envie d’entendre, que ce soit pour la guitare ou les autres instruments. Quand le titre est abouti,  j’envoie des maquettes aux musiciens qui sont libres de proposer leurs propres idées. Je suis ouvert à toutes les suggestions.
Il y a une constante également dans le choix de tes collaborations, tu es fidèle depuis longtemps au label Dixiefrog (8 albums) et on retrouve régulièrement certains artistes à tes côtés sur scène comme sur disque ?
C’est vrai, on a tissé des liens au fur et à mesure des rencontres et des années. Le blues, c’est un peu comme une famille, on se connaît tous. Et puis, il arrive que cela accroche humainement avec certains. Neal Black par exemple, cela fait 15 ans qu’on collabore, que ce soit sur ses disques, les miens ou sur des projets externes. Avec Billy Price, l’ancien chanteur de Roy Buchanan, c’est un peu la même chose. En général, quand  j’écris, c’est sur des sujets très terre à terre, sur  la vie de tous les jours. De temps en temps, quand j’ai envie de paroles plus ciblées, je fais appel à eux, je leur propose un thème…on se connaît « par cœur » et ils savent ce que j’attends d’eux.
Tu es guitariste, chanteur mais également producteur ?
De plus en plus. J’ai toujours produit mes albums et depuis quelques années, je le fais également pour d’autres. C’est un rôle que j’adore.
Et tu  fais des interventions dans les écoles de musique ?
Comme la scène ou la production, c’est du partage et de la transmission. Je fais régulièrement des master class. Il est tellement gratifiant de donner envie à des jeunes de faire de la musique.
Photo : François Maincent.

Photo : François Maincent.

Revenons sur ta carrière. En 2009, tu rencontres Jacques Dutronc ?
On a fait 89 concerts ensemble. Quand il y a eu « les Vieilles Canailles » ave Eddy Mitchell et Johnny Hallyday, Jacques m’a demandé d’être de l’aventure. Les trois chanteurs avaient chacun leur guitariste : Basile Leroux et Eddy, Yarol Poupaud et Johnny et moi avec Jacques. On se connaissait et on s’est tous bien entendu. Nous étions chacun « responsable » des parties guitares des morceaux choisis de nos « patrons ».
En 2012, tu es allé jouer au mythique Sun Studio à Memphis, là où Elvis Presley a enregistré son premier tube « That’s All Right Mama » ?
Je représentais la France à « l’International Blues Challenge » qui avait lieu dans cette ville. J’ai d’ailleurs terminé demi-finaliste. Le Studio étant très prisé, on a enregistré là-bas de 1 heure à 4 heures du matin avec mes musiciens. Il n’y avait personne à part nous et c’était très émouvant de se retrouver dans un endroit aussi important pour l’histoire des musiques populaires.
Photo : Thierry Wakx.

Photo : Thierry Wakx.

Illustrations : Carlos Olmo Martin.

Illustrations : Carlos Olmo Martin.

Parlons maintenant de ton nouvel opus qui retrace 25 ans de carrière. Pourquoi un album studio et un deuxième « live » ?
C’est venu naturellement. En réécoutant les morceaux, mon label Dixiefrog m’a proposé de faire un double CD. Le blues est une musique qui prend une nouvelle dimension sur scène. Par exemple, les titres en hommage à Roy Buchanan (« Blues for Roy ») et Gary Moore (« Gary’s Gone ») sont bien meilleurs dans les versions « public » et il aurait été dommage de ne pas les inclure dans cette compilation. Les deux facettes de mon travail sont ainsi représentées.
Ce disque est un témoignage agrémenté de deux inédits (« Beyond the Moon-part II » et « I’m a Ram »). Il représente la fin d’un chapitre et le début d’un autre. Je suis très heureux et même un peu fier de ce premier quart de siècle artistique, je n’ai aucun regret. Maintenant, j’entame les 25 prochaines années avec sérénité (rires).
                                   Entretien réalisé à Paris par Frantz-Minh Raimbourg

Publié dans Blues

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